Il est impossible de s’insurger contre le Rwanda de Paul Kagamé sans comprendre d’une part, les relations troubles entre le Zaïre du maréchal Mobutu Sese Seko et le Rwanda du général Juvénal Habyarimana et d’autres part les relations souillées entre la France et le Rwanda de l’avant génocide. Le Zaïre (aujourd’hui, République Démocratique du Congo, RDC) a joué un rôle controversé dans le génocide rwandais et ses conséquences. Le président Mobutu, a été accusé de soutenir les Hutus extrémistes responsables du génocide rwandais de 1994. L’administration Mobutu a donc joué un rôle fangeux dans la déstabilisation du Rwanda, notamment avant, pendant et après le génocide rwandais de 1994. Des rapports indiquent que Mobutu a permis aux milices hutus de se réfugier au Zaïre après le génocide, où elles ont continué à mener des attaques contre le Rwanda.
Avant le génocide, le Zaïre de Mobutu a servi de base arrière pour les Forces armées rwandaises (FAR) et les milices hutues. Le régime de Mobutu a permis aux forces rwandaises de s’entraîner et de se réarmer sur le sol zaïrois. La France, qui soutenait le régime d’Habyarimana, a également utilisé le Zaïre comme base pour fournir une aide militaire et logistique aux forces rwandaises. Le soutien militaire de la France au régime de Juvénal Habyarimana au Rwanda a été significatif et incompréhensible. La France a signé un Accord particulier d’assistance militaire avec le Rwanda en 1975, qui a été renforcé sous la présidence de François Mitterrand. Cet accord permettait aux militaires français de former et d’encadrer les forces armées rwandaises. En 1992, un avenant à cet accord a élargi l’assistance militaire française aux Forces armées rwandaises (FAR), permettant aux militaires français de participer à la préparation et à l’exécution des opérations militaires. Ce qui signifie que le régime de M. Mitterrand a planifié le génocide qui fera 800 mille morts au Rwanda. L’armée française a fourni un soutien logistique, des armes et une formation aux FAR. Les militaires français ont également participé à des opérations militaires contre le Front patriotique rwandais (FPR). La France a en plus lancé l’opération Amaryllis en 1994 pour évacuer les ressortissants français et les membres de la famille Habyarimana. La France a fourni des armes et des munitions au régime de Habyarimana, même après le début des massacres contre les Tutsi. Les autorités françaises ont également formé et équipé des milices civiles. Le soutien militaire de la France au régime de Habyarimana a été marqué par une assistance logistique, des armes, une formation et une participation directe aux opérations militaires. Ce soutien a été critiqué pour son rôle dans la perpétuation des violences et des massacres au Rwanda.
Pendant le génocide, le Zaïre a continué à jouer un rôle significatif en permettant aux milices hutu de se réfugier sur son territoire. Les milices ont utilisé le Zaïre comme base pour lancer des attaques contre les Tutsis et les forces du Front patriotique rwandais (FPR). L’administration Mobutu a fermé les yeux sur ces activités, contribuant ainsi à la poursuite des violences.
Après le génocide, le Zaïre a accueilli des centaines de milliers de réfugiés hutus, y compris des membres des milices responsables du génocide. Ces réfugiés ont continué à mener des attaques transfrontalières contre le Rwanda depuis le territoire zaïrois. Cette situation a conduit à une intervention militaire du Rwanda et de l’Ouganda, qui ont soutenu les rebelles de l’Alliance des forces démocratiques pour la libération du Congo-Zaïre (AFDL) dirigée par Laurent-Désiré Kabila4. Cette intervention a finalement conduit à la chute du maréchal Mobutu en 1997 et à la prise de pouvoir par Kabila. Le président Mobutu a joué un rôle significatif dans la déstabilisation du Rwanda en permettant aux forces rwandaises et aux milices hutu d’utiliser le territoire zaïrois comme base arrière, en fermant les yeux sur leurs activités pendant le génocide, et en accueillant des réfugiés hutu après le génocide, ce qui a conduit à une intervention militaire régionale et à la chute de son régime. Ces événements montrent comment le régime de Mobutu a été poussé par ses parrains – qui sont ironiquement les mêmes parrains des présidents Kagamé et Tshisekedi – à s’impliquer dans les dynamiques complexes et tragiques de la région pendant et après le génocide rwandais. De nombreux observateurs estiment que le soutien du président Mobutu aux génocidaires rwandais était en grande partie dû aux pressions exercées par la France et certains de ses alliés, qui avaient eux-mêmes soutenu le régime de Juvénal Habyarimana. Selon cette perspective, Mobutu agissait sous la menace de ces partenaires étrangers, craignant de perdre leur soutien crucial pour maintenir son pouvoir.
Le rôle trouble des puissances étrangères dans la déstabilisation du Congo
Les documents déclassifiés de la CIA révèlent que l’agence a joué un rôle significatif dans les événements entourant l’assassinat de Patrice Lumumba, le premier à occuper le poste de Premier ministre en République démocratique du Congo. Selon ces documents, la CIA a effectivement mise sur pied des plans pour éliminer Lumumba, qu’elle considérait comme une menace en raison de ses tendances nationalistes et patriotiques. Les documents montrent que la CIA a fourni un soutien financier et logistique à Mobutu pour renforcer sa position et contrer l’influence de Lumumba. Mobutu a finalement pris le pouvoir en 1965 et est resté un pion clé des États-Unis pendant la guerre froide.
La déchéance de Patrice Lumumba, est un événement marquant de l’histoire de la guerre froide, impliquant plusieurs acteurs étrangers, notamment les États-Unis et la Belgique. L’assassinat violent et barbare de Patrice Lumumba représente l’événement ultime qui a permis aux prédateurs européens et aux impérialistes américains de s’emparer définitivement des ressources naturelles du Congo. Depuis cet acte odieux et révoltant, les dirigeants successifs du Congo, puis du Zaïre, et à nouveau du Congo – Mobutu Sese Seko, Laurent Désiré Kabila, Joseph Kabila et aujourd’hui Félix Tshisekedi – ont été des vassaux de gré ou de force des prédateurs étrangers. La notion de contrainte et de menace analysée plus bas permettra de mieux comprendre pourquoi les autorités congolaises élues ou arrivées au pouvoir par rébellion ne peuvent pas ne pas obéir aux injonctions de certains pays occidentaux qui extorquent les richesses de leur pays. Il est fondamental pour les Africains de réaliser que Patrice Lumumba devait servir d’exemple de la cruauté de ses assassins américains et européens, afin de marquer les esprits et faire comprendre que toute résistance à l’exploitation des ressources naturelles du Congo engendrerait un traitement similaire. Par exemple, son arrestation par les troupes de Mobutu Sese Seko sur instructions des États-Unis via la CIA, sa torture et son exécution brutale sous la supervision d’officiers belges, comme le commissaire de police Frans Verschile et le Lieutenant Colonel Louis A. M. de Witte, illustrent bien cette cruauté. C’est cette peur de subir le même sort qui a conduit à la mollesse, à la soumission, à la lâcheté et à la complicité tacite et/ou active de tous ses successeurs, préalablement mentionnés.
Brève chronologie historique des événements
Le Congo belge obtient son indépendance le 30 juin 1960, et Patrice Lumumba devient le Premier ministre et véritable chef de l’État. Il faut noter que la Constitution congolaise de l’époque, adoptée en 1960, établissait une répartition des pouvoirs entre le président de la République et le premier ministre. Patrice Lumumba, en tant que premier ministre, incarnait le pouvoir exécutif et était responsable de la gestion quotidienne du gouvernement et de la mise en œuvre des politiques. Joseph Kasa-Vubu, en tant que président, avait un rôle plus cérémonial et symbolique, similaire à celui des monarques dans les monarchies belge et britannique.
Rapidement après l’indépendance, en observant les tendances souverainistes de M. Lumumba qui souhaitait véritablement faire profiter aux Congolais les richesses de leur pays, les prédateurs coloniaux européens et les impérialistes américaines font naitre et exacerber des tensions, notamment avec le sécession de la province du Katanga. Lumumba demande de l’aide militaire à l’ONU, mais il se heurte à des résistances. Pendant que les États-Unis et leurs alliés du bloc occidental profitent de l’occasion pour l’accuser de chercher le soutien de l’Union soviétique pour faire face à la crise, ce qui accentue leurs interférences pour préserver leur vision de la démocratie. Le premier ministre Lumumba est arrêté en décembre 1960 par le gouvernement de Joseph Mobutu, qui a pris le pouvoir par un coup d’État organisé par la CIA et exécuté le 17 janvier 1961.
L’implication des prédateurs coloniaux européens et américains dans la planification et l’exécution de Patrice Lumumba ne souffre aujourd’hui d’aucun doute. Des documents déclassifiés ont révélé que la CIA avait développé des plans pour son élimination, notamment des tentatives d’empoisonnement. L’idée était d’utiliser des agents comme un dentifrice contaminé ou une broche à dents pour l’empoisonner. Des rapports indiquent que les États-Unis ont fourni un soutien financier et militaire au régime de Mobutu, mais les montants exacts sont souvent difficiles à établir. Certains documents suggèrent que la CIA a versé des millions de dollars pour soutenir Mobutu et ses forces, notamment dans le cadre d’une opération visant à contrer l’influence soviétique supposée en Afrique. Cependant, les chiffres exacts varient selon les sources et les périodes. La Belgique, qui a pratiqué l’esclavage domestique sur le terrain, a également joué un rôle crucial dans la déstabilisation de Lumumba et a été impliquée dans son arrestation et son exécution tel que démontré plus haut. La déchéance de Patrice Lumumba, son humiliation publique et l’extrême cruauté de son exécution est un exemple emblématique des interventions des puissances étrangères dans les affaires africaines durant la guerre froide, avec des conséquences tragiques pour la démocratie et la stabilité en République démocratique du Congo.
Contrainte et menace ou complicité de plein gré?
Pour juger le comportement des dirigeants africains, et notamment congolais, que beaucoup soupçonnent d’être complices des prédateurs coloniaux étrangers, de leurs multinationales, de leurs institutions financières, de leur système politique de « démocratie électorale décorative » et de leur système de l’économie de marché, il est primordial de comprendre les notions de contrainte et de coercition auxquelles ces dirigeants font face. Comprenez que Mobutu Sese Seko a été soutenu par les puissances occidentales, notamment les États-Unis et la Belgique, en échange de l’accès aux ressources naturelles du Congo. De même, Laurent-Désiré Kabila a dû composer avec les pressions internationales, les menaces de mort, les intimidations et les intérêts économiques étrangers pour maintenir son pouvoir. Kabila qui se montrait partisan de la philosophie lumumbiste de répartition des richesses du Congo au Congolais sera d’ailleurs également assassiné. De plus, il est important de noter que si aujourd’hui le président Paul Kagamé obéit aux injonctions des Européens et des Américains pour piller les richesses du Congo, c’est également pour garantir son pouvoir. Cette situation est similaire à celle de Juvénal Habyarimana, qui avait été contraint de servir la France pour maintenir son régime.
Dans les systèmes juridiques démocratiques, la contrainte ou la coercition est souvent reconnue comme un facteur atténuant dans l’évaluation de la responsabilité criminelle. Les individus qui commettent des actes criminels sous une contrainte physique ou psychologique significative peuvent être considérés comme ayant une capacité réduite à agir librement. Cela peut se traduire par l’incapacité de consentir. Lorsqu’une personne agit sous la menace d’une violence imminente ou d’autres préjudices graves, cela peut conduire à une incapacité à consentir à l’acte criminel. C’est exactement les contraintes de cette nature auxquels les dirigeants africains sont assujettis par des prédateurs coloniaux qui n’hésitent pas à semer la terreur, à torturer, à exécuter et dissoudre dans de l’acide le cadavre des patriotes Africains qui s’opposent à l’extorsion de nos ressources naturelles. Cette contrainte peut réduire ou élever leur niveau de culpabilité et peut même justifier une exemption de responsabilité pénale. Peut-on enlever à nos dirigeants le droit à la défense incluant la possibilité de prouver qu’ils agissent sous contrainte, alors qu’ils ont vu leurs prédécesseurs dépecés par les Européens et les américains?
La contrainte peut prendre différentes formes et peut influencer le comportement des individus dans des situations extrêmes similaires à celles auxquelles les autorités congolaises et rwandaises sont confrontées. Un individu peut être amené à commettre un homicide involontaire s’il agit sous la contrainte, par exemple, en étant menacé de violence. Dans certaines situations, une personne pourrait être forcée à causer la mort d’une autre sans intention criminelle : peut-on logiquement discarter cette défense pour disculper nos dirigeants? Il faut tout de même ajouter que la contrainte ne peut pas justifier des actes comme le génocide ou d’autres violations graves des droits humains. Dans le cas qui nous occupe, les menaces de violences dont notamment des coups d’État, des assassinats politiques, des guerres civiles et des activités terroristes via la création de groupes religieux sont des réalités factuelles qui crèvent les yeux auxquelles sont exposées les autorités africaines indociles et insubordonnées.
En guise de rappel historique, notons que les juifs de l’armée d’Hitler sont considérés comme des soldats ayant agit sous la contrainte. L’affirmation selon laquelle plus de 150 000 Juifs allemands ont intégré l’armée allemande pendant la période nazie, souvent citée dans le contexte de débats sur la collaboration juive avec le régime nazi, provient en grande partie des recherches de l’historien américain David S. Wyman, qui a également écrit sur l’Holocauste et la réponse des Juifs des États-Unis à cette catastrophe. Daniel Goldhagen, auteur du livre « Les bourreaux volontaires de Hitler : Les Allemands ordinaires et l’Holocauste » (1996), soutient dans cet ouvrage que de nombreux Juifs dans l’armée nazie ont participé activement à la persécution des Juifs. Il y a une unanimité académique selon laquelle, les soldats juifs qui ont servi dans l’armée allemande pendant la Seconde Guerre mondiale étaient des victimes dans un système qui les a persécutés de manière systématique. Il est souligné qu’ils faisaient face à une réalité tragique où ils devaient choisir entre servir un régime oppressif ou risquer leur vie et celle de leur famille. Il est important de préciser que la majorité des recherches historiques s’accordent à dire que les juifs qui ont intégré l’armée nazie faisaient face à des menaces de violence ou de mort, et que beaucoup d’entre eux étaient dans des situations de contrainte extrême. L’Holocauste a conduit à la mort de six millions de Juifs, et ceux qui ont servi dans l’armée allemande l’ont fait dans des conditions de coercition ou d’illusions sur la nature du régime. L’idée que ces soldats étaient des victimes sous contrainte est largement acceptée dans le cadre de l’histoire de l’Holocauste, et la position d’Israël et d’autres historiens tend à voir ces individus comme des victimes du régime nazi, plutôt que comme des collaborateurs.
Autrefois, les États-Unis et l’Europe coloniale ont exploité le Zaïre dirigé par Mobutu pour déstabiliser le Rwanda. Aujourd’hui, ces mêmes acteurs se servent du Rwanda sous le président Kagamé pour déstabiliser la République Démocratique du Congo (RDC) et extorquer ses richesses naturelles. Dans ce contexte de violence historique et d’ingérence impérialiste, de nombreux dirigeants africains agissent sous contrainte, craignant de subir le même sort que Patrice Lumumba, Mouammar Kadhafi, Laurent Gbagbo, Sylvanus Olympio, Ernest Ouandié, et d’autres leaders éliminés ou renversés en raison de leurs positions anti-impérialistes. Rappelons que le renversement de Kadhafi en 2011 a été une intervention occidentale visant à neutraliser un dirigeant qui menaçait leurs intérêts en Afrique. De même, le cas du président Gbagbo, arrêté et incarcéré, déporté illégalement devant la Cour pénale internationale (CPI) après une crise politique à l’issue de laquelle il a été déclaré gagnant de l’élection présidentielle, souligne les risques encourus par les leaders africains qui s’opposent aux puissances occidentales. Thomas Sankara, président burkinabé, assassiné en 1987, était connu pour ses politiques anti-impérialistes et ses efforts pour promouvoir l’autosuffisance alimentaire. Son assassinat était clairement un acte de répression par ceux qui craignaient ses idées révolutionnaires d’indépendance pleine et entière. Les politiques de réforme agraire du président Mugabe qui ont conduit à la confiscation des terres volées aux noirs par les fermiers blancs ont entraîné des sanctions occidentales, des menaces et des pressions internationales, ce qui a exacerbé les tensions internes et a conduit à son renversement. Ces exemples illustrent la peur persistante parmi les dirigeants africains de subir des conséquences violentes pour avoir défié les intérêts occidentaux, renforçant l’idée qu’ils agissent souvent sous la contrainte pour assurer leur survie. Cette dynamique crée un climat d’insécurité et de manipulation, poussant certains présidents à se conformer aux diktats et désidératas des pays occidentaux pour préserver leur pouvoir et leur sécurité.
Les États-Unis et l’Union européenne : des inconditionnels du Rwanda
Les relations entre le Rwanda, ses alliés occidentaux, notamment les États-Unis et l’Union européenne, ainsi que le contexte de la République Démocratique du Congo (RDC), sont marquées par des enjeux géopolitiques, économiques et historiques. Tel que mentionné en détail plus haut, le conflit en RDC, et en particulier dans l’est du pays, est en partie le résultat de la guerre civile rwandaise et du génocide de 1994. Après le génocide, des millions de Rwandais, dont de nombreux membres de l’ancienne armée, se sont réfugiés dans l’est de la RDC, ce qui a entraîné des tensions et des conflits armés. Le Rwanda a souvent été accusé d’intervenir militairement en RDC pour soutenir des groupes rebelles, tels que le M23, qui ont combattu contre le gouvernement congolais.
Le Rwanda, en tant que pays enclavé et avec une économie en développement, a cherché à établir des accords économiques avec ses voisins et les puissances occidentales. Les matières premières, notamment les minéraux comme le coltan, l’or et les diamants, jouent un rôle crucial dans l’économie rwandaise. Le Rwanda a signé des accords avec des entreprises et des pays pour l’exploitation de ressources minérales. Ces accords sont critiqués pour leur impact environnemental et social, ainsi que pour les implications de la chaîne d’approvisionnement sur les conflits en RDC. Il est aujourd’hui avéré que les États-Unis et l’UE soutiennent le Rwanda par le biais d’aides financières et de coopération militaire. Les États-Unis fournissent des formations aux forces armées rwandaises, en raison des accords bilatéraux entre les deux pays.
De nombreux analystes politiques et observateurs africains accusent l’UE et les États-Unis de fermer les yeux sur les actions du Rwanda en RDC, en raison de leurs intérêts stratégiques et économiques dans la région. Ces critiques soulignent que le soutien occidental au président rwandais Paul Kagamé et au gouvernement rwandais contribue à des violences et à des violations des droits de l’homme, notamment en soutenant des groupes comme le M23. En effet, le Rwanda est devenu un acteur clé dans le commerce de minerais, malgré ses propres réserves limitées. De plus, les accords commerciaux entre le Rwanda et l’Union européenne soulèvent des questions sur la provenance des matières premières raffinées. Cette situation alimente les suspicions de néocolonialisme et d’exploitation des ressources congolaises par des puissances étrangères.
L’anathème sur les présidents Paul Kagamé et Félix Tshisekedi : Pourquoi n’en suis-je pas capable?
Les Africains sont largement divisés dans leurs opinions sur le rôle que les partenaires du président Kagamé l’intiment à jouer en République Démocratique du Congo. Si la condamnation des actions du M23 qui terrorise les congolais ne souffre d’aucune discordance, beaucoup sont tout simplement sidérés par les prouesses du M23 soutenu par l’OTAN, les États-Unis et l’Union européenne. Des analystes politiques africains expriment des critiques acerbes à l’égard du président congolais Félix Tshisekedi, l’homme à la tête d’un pays immense de plus de 100 millions d’habitants. Ces critiques soulignent qu’il se laisse ridiculiser, menacer et occuper par le Rwanda, un pays d’à peine 14 millions d’habitants, soutenu militairement par les États-Unis et les pays européens. Les intellectuels africains soulignent que cette dynamique met en évidence un affaiblissement de la position de Tshisekedi et, par extension, celle des dirigeants africains face à des puissances étrangères. Ils insistent sur le fait que la démographie croissante de l’Afrique, qui compte plus d’1,3 milliard d’habitants, ne se traduit pas toujours par un pouvoir politique équivalent, permettant ainsi à de petites populations, notamment celles de pays européens, de maintenir une influence disproportionnée sur des nations africaines riches en ressources. Cette situation soulève des questions sur la souveraineté et l’autonomie des États africains dans un contexte mondial où les intérêts géopolitiques sont souvent en jeu. Les États-Unis et l’Union européenne ont fourni des milliards de dollars en aide militaire et économique, ainsi que des armements avancés, des systèmes de défense anti-aérienne, et des renseignements militaires pour soutenir l’Ukraine dans sa lutte contre l’invasion russe. Dans ces nombreux débats universitaires africains, l’accent est mis sur le fait que plus d’une décennie de présence militaire française et occidentale n’a pas réussi à contenir le terrorisme au Sahel. Les nouvelles autorités militaires de l’Alliance des États du Sahel reprochent régulièrement à la France ses accointances avec des mouvements terroristes, dont Al-Qaïda. Ces accusations sont renforcées par les révélations de l’administration Trump concernant l’utilisation des fonds alloués à l’USAID. Au moins un membre du Congrès américain a expressément expliqué que l’USAID avait financé Boko Haram dans la région. Le membre du Congrès américain Scott Perry, un républicain de Pennsylvanie, a affirmé que l’USAID avait financé des groupes terroristes, y compris Boko Haram. M. Perry a fait cette déclaration lors de l’audience inaugurale du sous-comité sur l’efficacité gouvernementale le 13 février 2025. De plus, les autorités maliennes reprochent à la France d’avoir offert la région de Kidal à des organisations terroristes, tout en signalant que la région a été libérée grâce à la coopération militaire russe. Certains se désolent du fait que le président Tshisekedi ne s’inspire pas de son homologue malien, le président Assimi Goïta pour acheter des armes en Russie, en Turquie, en Chine et en Iran afin de neutraliser les terroristes du M23, plutôt que de s’allier aux parrains de Kagamé, qui sont les véritables instigateurs du mal à combattre.
Ces critiques mettent aussi en lumière le paradoxe dans la manière dont les puissances occidentales soutiennent l’Ukraine, un pays de 41 millions d’habitants, face à l’immense Russie, qui compte environ 144 millions d’habitants. Malgré le soutien militaire massif de l’OTAN, incluant des armements sophistiqués et des milliards de dollars en aide, la Russie résiste et tient en main les cartes de négociations futures alors que le président Zelensky et ses alliés de l’union européenne n’en n’ont aucune en dehors d’une implication américaine.
Beaucoup reviennent sur les enthousiasmes débordants du régime Macron de profiter de la guerre en Ukraine pour affaiblir une Russie très offensive en Afrique au point de tourner à néant ce que jadis la France considérait avec paternalisme hégémonique et condescendance comme son pré-carré. Pour rappel, le ministre français de l’Économie, Bruno Le Maire, avait promis en mai 2022 de provoquer l’effondrement de l’économie russe à travers les sanctions économiques occidentales imposées en réponse à l’opération spéciale russe en Ukraine. M. Le Maire avait déclaré que l’objectif des sanctions imposées à la Russie était de « détruire l’économie russe » en réponse à l’invasion de l’Ukraine. Il a fait référence à l’intention des pays occidentaux de rendre la Russie économiquement isolée et d’affaiblir sa capacité à financer son effort de guerre. Le Maire avait également mentionné que les sanctions visaient à atteindre un « effet maximal » sur l’économie russe. Depuis le début de l’invasion de l’Ukraine, l’Union européenne et d’autres alliés occidentaux ont imposé un nombre considérable de sanctions à la Russie. À la fin de 2023, on estimait qu’il y a eu plus de 1 800 sanctions individuelles ciblant des secteurs économiques clés, des personnalités, des entreprises et des institutions financières. Ces sanctions touchent divers domaines, notamment l’énergie, la finance, les exportations de technologies et les biens de consommation. Les résultats de ces sanctions sont mitigés, voire même insignifiants sur l’économie russe. Bien que les sanctions aient eu un impact négatif, sur certains secteurs de l’économie russe, franchement marginal, la Russie a réussi à trouver des alternatives et à renforcer ses échanges avec des pays comme la Chine, l’Inde et surtout avec de nombreux pays africains alors que le continent noir reste un réservoir inépuisable de matières premières. En 2024, la croissance du PIB russe a été de 4,1%, ce qui est supérieur à celle des pays du G7. En comparaison, les États-Unis ont enregistré une croissance de 2,8%, le Canada de 1,5%, la France de 1,1%, le Royaume-Uni de 0,9%, et l’Italie de 0,5%8.
Au regard des spectaculaires performances de l’économie de la Russie, la critique des analystes africains se fait insistante. Elle repose sur l’idée que les dirigeants africains, comme Tshisekedi, pourraient être perçus comme des exemples de l’incapacité à faire face aux pressions externes, malgré la croissance démographique significative du continent. Cela soulève des questions sur la manière dont les États africains peuvent renforcer leur souveraineté et leur résilience face à des influences extérieures, tout en exploitant leur potentiel démographique et économique. En définitive, il faut retenir que les présidents Paul Kagamé du Rwanda et Félix Tshisekedi de la République Démocratique du Congo (RDC) sont véritablement des victimes de la prédation coloniale occidentale. Historiquement, les puissances occidentales ont utilisé le Zaïre (aujourd’hui RDC) sous Mobutu pour déstabiliser le Rwanda. Aujourd’hui, ces mêmes puissances exploitent le Rwanda sous Kagamé pour déstabiliser la RDC. Cette dynamique de manipulation et d’ingérence impérialiste a créé un climat de méfiance et de suspicion entre les deux pays. Les ressources naturelles de la RDC, telles que le coltan et l’or, sont au cœur de cette exploitation, alimentant les conflits et les tensions régionales. Les présidents Kagamé et Tshisekedi se retrouvent ainsi pris dans un jeu de pouvoir orchestré par des intérêts étrangers, illustrant la continuité de la prédation coloniale en Afrique.
Disculper le président Tshisekedi?
Ceci étant dit, les choix controversés et déconcertants que font le président congolais rendent inaudibles les arguments de sa disculpation. Du 28 juillet au 6 août 2023, la ville de Kinshasa a accueilli plus de 3 000 participants issus des États et gouvernements membres de la Francophonie dans le cadre des IXème Jeux de la Francophonie. Le gouvernement congolais avait déclaré avoir injecté 324 millions de dollars dans ce projet, un montant qui a suscité de vives réactions. Des millions d’Africains ont été choqués de voir le président Tshisekedi mettre autant d’argent pour promouvoir une langue coloniale européenne, alors que le pays fait face à des défis sécuritaires majeurs, notamment la menace des terroristes du M23. Certains ont estimé que ces fonds auraient pu être utilisés pour acheter des armes en Russie, Chine, Turquie ou Iran afin de libérer le pays des groupes armés. Le budget initial des jeux était de 48 millions de dollars, mais il a été multiplié par plus de six en raison de la construction et de la réhabilitation des infrastructures sportives. Pour des raisons de trésorerie, la province canadienne du Nouveau-Brunswick, la seule province constitutionnellement francophone de ce pays, avait renoncé à organiser les Jeux de la Francophonie et promouvoir le français, la langue de leurs ancêtres. En revanche, le Congo, un pays en guerre, a accepté d’organiser ces jeux qu’une province du Canada a refusé d’organiser. Certains observateurs africains estiment que cette décision pourrait être attribuée à une combinaison de facteurs tels que l’érotomanie, le complexe d’infériorité ou le syndrome de Stockholm. En période de guerre et d’agressions armées, la priorité d’un pays devrait généralement être la sécurité nationale et la protection de ses citoyens. Décréter l’état d’urgence, investir dans l’armement et assurer une solde adéquate aux soldats sont des mesures cruciales pour répondre efficacement aux menaces immédiates. Organiser des activités sportives et des tournois internationaux, bien qu’ils puissent promouvoir une image positive du pays et renforcer les liens internationaux, sont des actes incompréhensibles, secondaires par rapport aux enjeux sécuritaires. Il est important que les dirigeants équilibrent leurs priorités pour répondre aux besoins urgents du pays tout en veillant à son développement à long terme. Les jeux de la francophonie ne peuvent en aucun cas être une priorité d’un pays en guerre.